Le Sacrum
Le Sacrum
L'art sauvera-t-il le monde? (1 de 3)
0:00
-9:25

L'art sauvera-t-il le monde? (1 de 3)

À ceux qui voient avec les yeux du coeur la beauté et la poésie d'un monde qui n'a pas fini de fleurir, spécialement pour nous, en ce printemps de tous les possibles.


Un nouvel espoir collectif naitra. Déjà il exige l’ardeur des lucidités exceptionnelles, l’union anonyme dans la foi retrouvée en l’avenir, en la collectivité future.               

- Borduas

Il était une fois, à Sainte-Foy

Début des années 2000, je terminais mon insignifiant DEC en sciences humaines au CÉGEP anglophone Champlain St-Lawrence, à Sainte-Foy. Ne sachant pas trop où m'orienter, je me disais qu'au moins j'y perfectionnerais mon speak english. C'est d'ailleurs ce qui me permet aujourd'hui de comprehend l'humour insipide et redondant d'un Sugar Sammy et be good at faire semblant que it's kind of funny, ou pas.

Bref, dans mon cours de history of art, j'ai rédigé un essai sur Paul-Émile Borduas, figure de proue du groupe des automatistes, dont je ne connaissais que le nom. Je l'avais choisis par intuition, mais quelle belle découverte ce fût. Non seulement ce travail a stimulé ma totale admiration face à l'esthétique intuitive de ses mystifiants tableaux, mais en apprenant plus sur son parcours, j'ai aussi été touché et ressenti une humble fierté dans mon coeur de jeune québécois, encore atteint du virus de la conquête abrahamique. Mon intention ici est d'honorer, pour une deuxième fois en 20 ans, cet homme qui a littéralement peint et écrit, un tableau capital de notre histoire populaire.

Pour ceux qui ne le connaissent pas, sachez qu'aux côtés d'Alfred Pellan et Jean-Paul Riopelle (pour ne nommer que ceux-ci!), non seulement Borduas figure parmi les grands artistes peintres du Québec, mais c'est aussi le visionnaire derrière l'incontournable manifeste Refus global, paru en 1948. Un pamphlet défibrillateur qui, avec 76 ans de recul, nous rappelle que nous sommes peut-être quelque chose comme un peuple au fabuleux destin. Mais attention, il ne faut  rien prendre pour acquis.

Refus global sema une controverse dès sa sortie, prouvant qu'il était destiné à jouer un rôle pour décloisonner la société québécoise de sa prison clérico-nationaliste, où les Mathieu Bock-Côté de ce monde semblent toujours purger leurs peines. Le texte appelait à un éveil des passions et des consciences en mettant en lumière, à travers une foi humaniste, la corruption déjà mortifère des institutions.

Bernard Jasmin écrit: « Refus global est un moment important de cette volonté de libération culturelle et sociale. C’est incontestablement le document le plus provoquant qui ait été écrit au Québec; le projet révolutionnaire élaboré proposait de rassembler les Hommes autour d’une valeur primordiale. Ce texte propose une nouvelle humanité, négatrice du passé, libre de toute loi, fondée sur le désir, l’imagination et la magie qui nous tourne vers l'avenir. Par contre, Refus global a été un texte libérateur ; il n’est pas un texte fondateur. »

Libérer la magie, le désir et l'amour fou enfoui dans l'inconscient collectif. Ces mots ne sont pas sans rappeler Catherine Dorion, mais également le célèbre poète surréaliste André Breton, qui entretenait une correspondance et des amitiés avec les automatistes. Ceci explique cela. Et vice versa.

Mais, jusque où l'influence du Refus global s'est-elle donc fait ressentir? Comme un pavé dans la marre, les mots révolutionnaires de Borduas ont-ils fait des vagues jusqu'à la plage situationniste de Debord et Vaneigem? Jusqu'en Mai 68? Soyons réalistes, exigeons que ce soit le cas.

Chose certaine, ici au Québec, Refus global eut l'effet choc nécessaire pour naviguer une sorte de passage obligé entre l'identité canadienne-française dépassée et l'émergente Québécoisie.  Il n'en demeure pas moins, comme le dit Jasmin, que ce fût un texte libérateur et non fondateur. Ce dernier il nous reste donc encore à l'écrire.

Il serait aussi logique de déduire que Refus global ait participer à mener le Québec vers ce simulacre de libération que nous appelons aujourd'hui révolution tranquille. J'utilise le mot simulacre parce que à mon sens, nous n'avons que remplacé le clergé catholique, par les nouveaux prêtres de la fonction publique et les vieilles idoles par les célébrités. En somme, de la providence à l'état-providence.


Je ne nie pas que la révolution tranquille ait apporté son lot de transformations positives ou qu'elle fût un pas dans la bonne direction. Ma question préalable est plutôt à savoir: sommes-nous réellement aller jusqu'au bout des aspirations poétiques soulevées par les automatistes? Cette nouvelle humanité; cette nouvelle vision mytho-poétique empreinte dans le Refus global? Nous en avons encore à peine égratigné la surface, mais en 2024, serions-nous prêts à faire un autre pas?

Pour fêter ses 76 ans, je suggère que nous dépoussiérons Borduas et le Refus global! Non pas comme une bible intouchable, mais plutôt comme un ainé, un repère historique, pour nous orienter dans la crise de sens actuelle. Mais avant tout, pour nous inspirer à écrire la suite.

Comme le dit ma chanson préférée d'Okoumé: Pour savoir où l'on va, y faut savoir par où on est allé.

Je propose donc ce voyage dans le temps, cette première action symbolique, avant que le Québec ne se perde encore dans l'adoration d'un nouveau clergé: celui des machines et de l'intelligence artificielle qui émerge graduellement des cendres de l'édifice en feu qu'est l'état-nation.

En tant que créateur et père de 3 enfants, j'appelle à ce nouvel espoir collectif dont rêvais Borduas, à raviver la flamme du feu prométhéen québécois, notre foi en un avenir convivial, généreux et rempli de sens où personne n'est laissé à l'abandon. Je crois que c'est plus que jamais une responsabilité primordiale. Que nous le devons à nous-même, à la terre-mère et aux générations futures. Si comme moi vous vous sentez inspirés, je lance le défi Lecture du Refus global  et voici la formule à suivre:

Après coup, nous pourrons redonner sens à la devise Je me souviens et rêver mieux ce nouvel entendement du monde, en prenant soin de resacraliser la vie. Celle-ci demeurant souvent la remarquable oubliée des grandes quête de libérations collectives.

*** Fin de la partie 1 ***

P.S. Savais-tu qu’écrire un texte me demande entre 10 à 20 heures? Je le fais de tout coeur avec grande joie, dans un esprit de contribution à mon époque. De ton côté, si tu apprécie me lire, pourrais-tu prendre 2 minutes de ton précieux temps pour t'abonner, partager ou laisser un commentaire. Je t’en remercie d’avance.

** Bio Yonathan V **

Toujours partant pour une balade en montagne, Yonathan habite depuis 2011, à Sainte-Émélie-de-l'Énergie, au Québec. Libre penseur d'inspiration situationniste, il prône la philosophie du suis-ton-coeur-jusqu'au-bout. Constamment en cheminement de conscience, aucune étiquette ne lui colle à la peau. Il marche humblement sur le sentier du coeur en livrant son art comme des bouteilles d'étoiles lancées humblement dans la mer profonde de la névrose moderne.

*** Sacrum ***

Sacrum est un espace pour se rassembler et faire revivre le sacré; célébrer la poésie vivante du grand mystère; explorer tous les sujets sans tabous et embrasser dans toute sa diversité la beauté sacrée du monde et des humains qui l'habitent.

1 commentaire
Le Sacrum
Le Sacrum
Explorer sans tabous la beauté sacrée du monde
Participer à l'émergence de l'Ère des Créateurs
Écoutez sur
App Substack
RSS Feed
Apparaît dans l'épisode
Yonathan